COVID19 – news semaine 11

Ca déconfine un peu, ca déconfine beaucoup, ca déconfine de partout, sauf dans les universités. Dans les nouvelles officielles, les écoles, les lycées, les restaurants, les TGV, mais les universités restent dans des préconisations de distanciation difficilement compatible avec des enseignements de qualité pour tous.

Puisque c’est mon job, je vais quand même continuer à imaginer une rentrée en mode distanciation sociale, à vous accompagner vers une rentrée de crise. Cela ne m’empêche cependant pas de rêver à une rentrée, qui sans contraintes d’espaces à préserver, intègrerait plus d’approches actives, accompagnerait l’autonomie des apprenants, développerait leurs esprits critiques et n’aurait pas peur de la distance dans l’apprentissage. Un enseignement qui saurait prendre de la distance avec les savoirs pour être plus proche des apprentissages.

Comme tout le monde, j’espère que les scientifiques se trompent (sic !) et que cette crise ne sera plus en septembre. Mais en attendant, je n’ai pas envie de me retrouver au pied du mur à la rentrée comme nous l’avons été le 16 mars. Pour cela, pas le choix, il faut analyser cette prochaine rentrée avec les éléments que nous avons. Autant préparer le scénario catastrophe lucidement et essayer de planifier les préparatifs qui pourraient être de l’investissement réutilisable.

Quelles sont pour le moment les informations :

  • Distanciation à la rentrée : entre 1,75m à 2m entre chaque étudiant, on parle de 4m2 par étudiant. De rapides calculs nous annoncent entre 20 à 30% de  capacité d’accueil.
  • Désinfection des surfaces de contact à chaque changement de salle, ce qui implique de soit laisser les mêmes étudiants dans la même salle pour la journée, soit de prendre 30 minutes entre chaque séance pour désinfecter. Difficile dans ces conditions de conserver les mêmes emplois du temps.
  • Pas de budget de crise en vue, les milliards pour relancer l’économie et les économies pour la formation.

Les grandes options synchrones présentées nationalement sont :

  • Garder un maximum de cours en présentiel. Pour qu’une séance soit faite à toute la promotion il va donc falloir la faire de 3 à 5 fois. Outre que je n’ai rien entendu sur le triplement des dotations humaines et financières des universités, je n’ai également rien entendu sur la réquisition de locaux pour y faire ces cours supplémentaires…
  • Retransmettre les séances faites devant une partie de la promotion. Imaginons pour commencer les contraintes techniques liées à la captation du cours. Nous avons 216 salles à Avignon Université, est-ce raisonnable d’équiper toutes ces salles ? Pour celles que nous pourrons équiper, de quoi s’agit il ? Un enregistreur automatique (Et oui, nous n’allons pas engager des dizaines de techniciens audiovisuel pour cadrer comme il se doit ce type d’événement), donc filmé de loin pour cadrer le tableau, ou filmé en gros plan, sans tableau mais également sans déplacements possible. Diffusé en direct ET mis à disposition au téléchargement pour tous les étudiants qui n’auront pas pu suivre ce direct pour x raisons techniques ou familiales. L’enseignement à distance nécessite de prendre en considération tous les aléas rencontrés par l’étudiant à qui l’on assure plus un lieu et un environnement propice à l’apprentissage. Comment faire dans les salles non équipées ? Demander aux étudiants de filmer avec leur téléphone ….
  • Passer toutes les séances à distance, dans un outils de classe virtuel, à supposer qu’il en existe un qui puisse accueillir tous les étudiants d’une promotion universitaire. C’est clair que tous les maux de l’EAD vont s’exprimer pleinement et au final cela ne sera que critiques justifiées. Quid des étudiants qui ne pourront pas suivre ces cours en direct, pour les raisons techniques ou d’environnement de travail déjà évoquées ? Comment retrouver ces échanges humains qui font la richesse de l’enseignement, impulsés par la fameuse communication non verbale sur laquelle l’enseignant réagit faisant ainsi preuve de pédagogie même en amphi…

Seules les solutions incluant une grosse part d’asynchrone et d’enseignement à distance permettent de relever le défi de cette rentrée sous contraintes sanitaires. Cependant l’enseignement à distance est une pratique particulière de l’enseignement et ne peut pas s’improviser au risque de s’attirer à raison tous les reproches de la communauté universitaire. L’EAD a des atouts important pour les apprentissages des étudiants mais il comporte aussi de gros risques d’échec qu’il faut maîtriser.

L’intérêt de l’asynchrone et de l’EAD est d’offrir à chaque étudiant :

  • la possibilité d’avancer à son propre rythme,
  • de choisir le meilleur moment pour étudier,
  • de pouvoir faire et refaire autant de fois que nécessaire,
  • de concilier ses études avec sa vie personnelle,
  • de développer des compétences d’organisation et d’autonomie,
  • une individualisation des apprentissages

Les risques de l’EAD sont principalement :

  • une motivation étudiante plus délicate,
  • une fracture numérique,
  • un contexte familial peu propice au études,
  • une autonomie d’apprentissage à apprendre,
  • une communication facilement défaillante,
  • une socialisation à réinventer.

Derrière ces risques, se cache aussi des atouts pour les apprentissages. Nous verrons ensemble dans les jours qui viennent comment manager au mieux tout cela. Ce travail d’apprivoisement de l’enseignement à distance est un investissement en temps certe, mais il est aussi réutilisable avec beaucoup de profits dans nos enseignements présentiels.

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